Contexte du projet
Compte tenu des évolutions du marché (personnalisation de masse, intégration d’une logique « produit-service », développement du secteur des services, contraintes liées à l’intégration du bilan carbone dans les stratégies de développement…), les entreprises et plus particulièrement les PME/PMI doivent de plus en plus s’ouvrir sur l’extérieur, développer des stratégies collaborations (intra et inter-entreprises et plus généralement intra et inter-organisations) et se restructurer pour rendre leur organisation (et le système d’information support) agile (c’est-à-dire capable de s’adapter aux changements structurels du marché).
Le développement de ces stratégies de collaboration plus ou moins éphémères repose non seulement sur le partage d’une culture et d’un projet commun mais aussi sur la construction collaborative du processus commun qui sert de support opérationnel à cette collaboration. Or les outils technologiques actuels (composants du système d’information, outils supports de workflow) requièrent l’intervention de spécialistes et le temps nécessaire au déploiement de la solution est souvent incompatible avec la durée de la collaboration.
Cette limite est d’autant plus mal perçue par les utilisateurs que le développement des technologies basées sur l’Internet et le Web 2.0 sont d’une intégration et d’un déploiement facile pour des non-spécialistes.
Le paradigme Web 2.0 est apparu en 2004 (Dale Dougherty) et s’est affirmé fin 2005 avec l’article de Tim O’Reilly « Qu’est-ce que le Web 2.0 ? ».
Un certain nombre de produits Web 2.0 ont émergé avec succès : MySpace (espaces personnels partagés), Flickr (partage de photos), Google AdSense (régie publicitaire web), Wikipedia (encyclopédie participative), LinkedIn (business networking).
Pour tous, le constat est le suivant :
– Le service s’améliore quand le nombre de ses utilisateurs augmente
– Et plus le nombre d’utilisateurs augmente, plus les revenus sont importants
Les grands principes qu’un produit doit respecter pour se déclarer Web 2.0 sont :
– Offrir un service et non pas un ensemble logiciel
– Disposer de données uniques, difficiles à recréer, et dont la richesse s’accroit à mesure que les utilisateurs en font usage
– Considérer les utilisateurs comme des co-développeurs
– Tirer parti de l’intelligence collective
– Toucher le marché jusque dans sa périphérie
– Libérer le logiciel du seul PC
– Offrir de la souplesse dans les interfaces utilisateurs, les modèles de développement et les modèles de gestion
Alors que jusqu’à présent le Web 2.0 permettait de collaborer sur les données elles-mêmes (images, connaissances, CV, micro-blogging, etc.), le projet Process 2.0 permet de collaborer sur les services c’est-à-dire sur la définition même des fonctionnalités.
Un environnement de conception et de déploiement agile
En effet, notre projet Process 2.0 propose de considérer les processus collaboratifs comme une composition de services métier, composition « dessinée » par les utilisateurs finaux eux-mêmes grâce à un studio collaboratif de conception de processus. Destiné à des utilisateurs finaux, ce projet intègre un ensemble de service d’aide à la conception du processus commun (grâce à une modélisation multi-facettes et à l’intégration de patrons) et permet de capitaliser les processus construits afin de pouvoir enrichir continument le système par l’intégration de nouveaux processus métier et de créer de réels « réseaux sociaux » favorisant le partenariat industriel en diffusant ces services métier auprès de communautés professionnelles.
Destiné à intégrer les utilisateurs finaux comme des co-développeurs de la solution (i.e. le processus collaboratif commun), la conception du studio a accordé une attention particulière à l’ergonomie et au retour d’expérience d’utilisateurs finaux afin de garantir une bonne diffusion de ces résultats.
Toutefois la stratégie de co-développement d’un processus collaboratif ne saurait s’arrêter à la seule spécification de ce processus. C’est pourquoi nous proposons de coupler ce studio de spécification à un outillage permettant de dériver le processus technologique support et le déployer sur une plateforme distribuée.
Cette approche qui intègre une vision « Software As A Service » (SaaS) et « Platform As A Service » (PaaS) permet de proposer une solution « de bout en bout » aux utilisateurs finaux, les libérant ainsi des investissements et gestion de projets de déploiements sur leur propre infrastructure. Ce ciblage permet donc d’atteindre non seulement des organisations (collectivités, administrations, PME, etc.) qui, par leur taille disposent déjà de services informatiques mais aussi des TPME et micro-entreprises en leur offrant l’ensemble des prestations technologiques nécessaires au déploiement de la solution. Ce ciblage contribue également à développer les communautés d’usagers, rendant par là même ce service plus attractif puisqu’il permet de développer des réseaux de partenariat et donc trouver plus facilement les « bons » partenaires pour construire un projet collaboratif. Ceci permet donc de développer les stratégies de « réseautage » des PMEs (qui constituent un vecteur majeur en termes de gisement d’emploi et d’aménagement du territoire) et micro-entreprises en démultipliant ainsi les possibilités de collaboration.
Le consortium composé des partenaires PME Genigraph, EBM WebSourcing et INSAVALOR, du laboratoire de recherches INRIA et de la Région Midi Pyrénées comme organisation utilisatrice propose de généraliser la mise en place de services en ligne par un effort permettant :
– d’une part de fournir un Atelier métier de conception Web sous forme de client riche et à l’ergonomie accessible à des non-techniciens permettant une définition simple des services par les organisations qui veulent les mettre en place. La modélisation graphique est essentiellement fonctionnelle mais permet néanmoins d’intégrer les stratégies de sécurité sous forme de « patrons » sélectionnables. De plus, cet atelier permet à plusieurs organisations de concevoir des services interopérables entre eux de façon à mettre facilement en réseau ces organisations. L’environnement de déploiement de l’atelier et le modèle économique ciblé s’appuient alors sur le paradigme dit « Software As A Service » (SaaS). Il tire par ailleurs avantage pour une large diffusion des principes issus des réseaux sociaux tels que la diffusion virale et l’ouverture sous forme d’API publique pour l’ajout de services.
– d’autre part de fournir une Plateforme d’exécution de ces services de type « Cloud computing » afin de diminuer la barrière au déploiement que constitue aujourd’hui l’hébergement des services en ligne. L’environnement de déploiement est donc proposé comme une Platform As A Service (PaaS).
On souligne que d’autres partenaires ont manifesté leur intérêt après le démarrage du projet et ont participé aux travaux :
– La Région Limousin qui a participé à l’expression des besoins
– La PME FullSave qui a offert une infrastructure Cloud pour le projet
Le système résultant du projet et nommé « Process 2.0 » permet de populariser la définition des services en ligne en l’ouvrant au plus grand nombre (associations, particuliers, micro-entreprises, PME, grandes entreprises, administrations, collectivités, etc.). Il supprime les freins à la mise en place des services en ligne (coût de réalisation ; coût d’hébergement ; complexité technique).
Un cas d’utilisation envisageable est par exemple la possibilité pour un Président d’association sportive de mettre en place pour ses adhérents des services en ligne. Il se connecte au site process20, cherche dans la bibliothèque de processus un processus d’inscription, le trouve publié par un Centre de loisirs municipal et le personnalise en fonction des particularités du workflow de son association. Puis il cherche un processus de paiement de cotisation. Il ne le trouve pas et le définit alors en ligne. Puis il recherche les services mis à disposition par le Ministère des Sports et connecte ses services aux services de demande de subvention en spécifiant les échanges demandés par le processus du Ministère. Enfin il clique sur « Rendre disponible » ce qui a pour effet de publier ses services sur un Cloud, de les connecter avec ceux du Ministère et de publier ses propres services dans le catalogue afin qu’ils puissent être réutilisés par d’autres associations et puissent être interfacés avec les processus publics tels que les obtentions de subvention.
Le schéma suivant présente la vision d’ensemble du système cible :
Les principaux composants sont :
– L’atelier de modélisation : il comprend deux points de vue principaux :
- Point de vue métier : permet à un utilisateur non informaticien de représenter graphiquement un service à valeur ajoutée composé à partir des services de base offerts par la plate-forme ainsi que des patrons liés aux propriétés non fonctionnelles (stratégie de sécurité). Cet outil aux caractéristiques ergonomiques avancées permet d’illustrer les besoins applicatifs tant fonctionnels qu’organisationnels et techniques.
- Point de vue technique : permet à un consultant d’enrichir le modèle précédent des informations nécessaires à l’exécution de l’application. Ce modèle permet notamment de préciser les informations concernant les services mis en œuvre, leur orchestration sous forme de processus ainsi que la déclinaison des politiques de sécurité (définies au niveau métier) en paramètres techniques pour la configuration de l’environnement technologique.
La synchronisation entre les deux vues précédentes est automatisée afin de maintenir la cohérence.
– La transformation de modèle : ce module permet de déduire les informations nécessaires au paramétrage des plates-formes d’exécution.
– L’environnement d’exécution : ciblant un déploiement dans un ou plusieurs « clouds » (architecture fédérée), cet environnement utilise un certain nombre de services métiers déjà disponibles (plate-forme e-Citiz) ainsi que l’ESB PEtALS pour l’intégration et la communication.
Conclusion :
L’innovation du système produite par ce projet résulte d’une part dans sa capacité à s’adresser à des populations non techniques (pas de prédisposition à la modélisation, aux techniques informatiques). Aucun système aujourd’hui n’a cette ambition.
L’autre innovation du système réside dans son ignorance de l’espace de déploiement : Internet passe d’une toile de données à une toile de services communicants.
Ainsi la technique de Génie Logiciel et les technologies des infrastructures matérielles et réseaux sont occultées à leurs utilisateurs.
Ce projet a obtenu le label du Cluster EDIT.
Quelques chiffres
Ce projet de recherche industrielle issu de l’Appel à Projets Web Innovant 2009 de la DGCIS a été coordonné par Genigraph e-Citiz. Il implique aussi les sociétés EBM WebSourcing et FullSave, ainsi que des laboratoires de recherche publics : INRIA Rocquencourt, INSA Lyon via INSAVALOR. Les partenaires pilotes sont les Régions Midi-Pyrénées et Limousin.
Le projet a commencé en février 2010 et dure 24 mois. Il a bénéficié d’une aide DGCIS de 541 958 € pour un coût global de l’ordre de 1,03 millions €.